À la manière de nos articles « voyager enceinte, c’est possible » et « voyager avec un bébé, c’est possible », nous souhaitons montrer qu’une autre manière de voyager est possible. En préambule de ces articles à venir, nous tenions à vous expliquer notre choix.
Aussi, nous partageons avec vous aujourd’hui un article un peu différent. En toute transparence, nous allons vous détailler nos habitudes de vie, le bilan carbone qui en découle et nos actions mises en place pour réduire celui-ci.
Notre manière de voyager va être fortement remise en cause. On vous explique tout ça.
L’objectif 2050, c’est 2 tonnes de CO2 émis, par an, par personne. Un vol Paris <> New York, c’est 2,5 tonnes de CO2 émis par personne.
Avant propos
Le réchauffement climatique est un fait scientifiquement prouvé. Conformément aux prévisions désastreuses qui nous attendent à l’horizon 2100, le thermomètre affiche déjà +1° C en 2019 par rapport à l’ère préindustrielle.
[Source : dossier de presse « Changement climatique : les résultats des nouvelles simulations françaises » par le Centre national de la recherche scientifique (CNRS), le Commissariat à l’énergie atomique (CEA) et Météo France]
Pour éviter le pire, l’objectif (acté par l’accord de Paris en 2015) est de limiter le réchauffement climatique à moins de 2° C. L’humanité doit ainsi réduire ses émissions de CO2 immédiatement, les diminuer de moitié d’ici 2030 puis atteindre la neutralité carbone en 2050 (émettre seulement ce que la Terre est capable d’absorber dans le but d’un équilibre parfait).
En France, notre mode de vie occidental est particulièrement néfaste pour l’environnement. En 2019, la moyenne des émissions de CO2 (ou équivalent) est d’environ 11 tonnes par an par français. En 2050, elle devra être de 2 tonnes.
[Source du graphique : étude Carbone 4 (juin 2019)]
Nos émissions CO2 doivent donc diminuer de 80 % en 30 ans.
Bien sûr, tout n’est pas de notre simple ressort de citoyen. Pour arriver à ce résultat, les 3/4 des diminutions doivent émaner des entreprises et de l’État. Ils doivent nous conduire, par des changements radicaux, à une nouvelle société postcarbone.
Et pour le 1/4 restant ? C’est à nous de prendre part et d’agir.
[À lire aussi : « Faire sa part ? Pouvoir et responsabilité des individus, des entreprises et de l’état face à l’urgence climatique » (Carbone 4) et le socle d’information initial de la convention citoyenne sur le climat qui dresse un bilan clair de la situation.]
L’empreinte carbone se calcule ici à partir de cinq grands items : mobilité, logement, biens et services privés, alimentation et services et investissements publics.
Nous avons ainsi calculé notre propre empreinte carbone…
État des lieux et prise de conscience : notre bilan carbone en 2019
Nés à la fin des années 80, nous avons grandi en connaissant les conséquences du réchauffement climatique. Nous avons toujours fait « attention » : trier nos déchets, faire nos trajets du quotidien à pied plutôt qu’en voiture, ne pas succomber – autant que possible – aux modes vestimentaires, manger des fruits et légumes de saison, installer un thermostat et faire changer nos fenêtres (ce qui a réduit de 40 % notre consommation de gaz !), etc. Nous pensions être plutôt « clean » du côté de nos émissions, malgré nos voyages… On fait attention au quotidien, pourquoi se restreindre sur ce qui nous fait plaisir ?
Puis les chiffres ont parlé.
En comparaison avec la moyenne française, nos émissions individuelles de l’item « mobilité » sont donc plus importantes. Le constat est évident. Nos voyages en avion sont responsables et nous générons sur ce poste-là quatre fois plus d’émission de CO2 (et équivalent) que la moyenne des français…
[Sources : données croisées établies à partir des chiffres de cet article « L’empreinte carbone des français, un sujet tabou ? » , du tableau Excel disponible sur le site avenirclimatique.org et du calculateur de Climat Mundi pour l’avion qui prend en compte la consommation de kérosène ainsi que le forçage radiatif des traînées de condensation.]
Nous avons dressé ce bilan sur notre mode de vie actuel sur les trois dernières années (une famille de 4 personnes, habitants en centre-ville d’une grande ville française).
En 2013, nos trajets en avion ont – à eux seuls – représenté autant d’émission de CO2 qu’un français sur une année !
De voir ces chiffres noir sur blanc, le choc fut (et est encore) rude. Nous n’avions aucunement conscience de notre empreinte carbone désastreuse…
En 2018, devant ce constat alarmant et suite aux premières grèves du climat de Greta Thunberg, un nouveau phénomène est apparu en Suède : flygskam, traduit en français par « la honte de prendre l’avion ».
Pistes et actions pour réduire notre bilan carbone
Comme évoqué plus haut, nous avions depuis longtemps adopté des actions pour réduire notre empreinte carbone. Mais celles-ci ne sont que « des petits pas ». C’est à dire que ces actions sont encourageantes, mais qu’elles sont (très) loin d’être suffisantes.
Nous n’avons pas pu tout changer en un claquement de doigt (notre voyage en Suède était par exemple déjà réservé). Ça a pris du temps. Et d’autres actions sont encore pour nous au stade du cheminement…
- Nous appliquons petit à petit, pièce par pièce dans notre habitation, le « zéro déchet ». C’est une réduction marginale de nos émissions mais qui est concrète, et qui nous donne matière à réfléchir sur nos habitudes d’achat et de consommation.
- En lien direct, nous raisonnons de plus en plus nos achats (avons-nous vraiment besoin de ce nouveau produit ?), en évitant le plastique et en privilégiant le local, le bio et les produits d’occasion quand c’est possible pour l’habillement et le matériel électronique. Nous estimons une réduction de 900 kg de CO2 de ce côté-là, soit 8 % de nos émissions.
- Nous réfléchissons à réduire notre consommation de vidéo en ligne (pour vous donner une idée, la vidéo représente 80 % du trafic Internet mondial, Netflix et YouTube en tête).
- Nous ne consommons plus de viande ni de poisson chez nous (environ 85 % de nos repas). Ça se traduit directement par une réduction de 1 tonne de CO2, soit 9 % de nos émissions.
- Nous ne prenons plus l’avion pour nos vacances. C’est une réduction directe de 2 tonnes de CO2, soit 18 %.
Ces actions sont facilement réalisables pour nous, car elles ne nous demandent aucun investissement financier. Notre empreinte carbone diminue ainsi de 35 %.
Nous faisons notre part pour avancer vers l’objectif de 2050.
Pour nos séjours en avion déjà effectués, nous avons aussi compensé nos émissions de CO2. Nous avons ainsi acheté des arbres pour valoriser et protéger les forêts françaises (arbres plantés avec la société bretonne Ecotree).
Compenser est un moindre mal (et ça donne bonne conscience…). Mais ce n’est malheureusement pas suffisant.
Pourquoi la compensation carbone ne suffit pas ?
La compensation carbone permet de neutraliser les émissions de CO2 en soutenant des projets tels que la protection et l’implantation de forêts ou l’investissement dans les énergies renouvelables.
Toutefois, ces projets doivent être efficaces et répondre à des critères stricts :
- être additionnel (c’est à dire que les projets n’auraient pas vu le jour sans ces financements)
- s’assurer que la quantité de CO2 compensée est mesurable
- avoir un processus de vérification de ces émissions compensées
- garantir que les crédits carbones ne soient pas vendus plusieurs fois
[Source : « La compensation volontaire : démarches et limites » par l’Agence de l’environnement et de maîtrise de l’énergie (ADEME)]
Outre le fait qu’elle a une faible probabilité d’assurer les réductions promises, la compensation carbone a surtout des « effets d’incitation pervers ». En effet, l’engagement du citoyen est moindre puisque peu importe ses actions, il se donne « bonne conscience » en déchargeant sa responsabilité sur d’autres acteurs via l’achat de crédits carbones.
« La compensation carbone permet de continuer à faire des choix problématiques pour le climat à moindre coût : il est toujours moins douloureux de compenser que de changer de comportement. »
[Sources : analyse « How additional is the CleanDevelopment Mechanism? » par Öko-Institut et « Compensation carbone, fausse bonne idée ? » par European think & do tank]
La compensation carbone se doit d’être uniquement un outil de dernier recours pour tout ce qui concerne les émissions inévitables. Voyager en avion pour ses vacances est ainsi loin d’être un besoin primaire.
Quel est le mode de transport le moins polluant ?
Pour un voyage le plus écoresponsable possible, le graphique ci-dessous vous donne une idée précise des émissions de CO2 générées par type de transport…
[Source des données : bilan GES par l’ADEME / Précisions : le graphique montre les émissions d’une voiture particulière d’une puissance fiscale de moins de 5 CV et à motorisation gazole et les émissions des trajets en avion de 3 à 4 000 km avec plus de 250 sièges à bord.]
Désormais, pour nos voyages, nous privilégions donc les séjours à proximité de chez nous (en Bretagne) et les trajets en train pour des destinations plus lointaines.
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Conclusion
Certains diront que nous en faisons trop. Certains diront que nous n’en faisons pas assez, que c’est bien trop tard ou que arrêter de prendre l’avion et de manger de la viande, ce n’est finalement qu’un problème de « riche ». Peu importe, ces décisions sont les nôtres. Nous souhaitons contribuer et faire notre part vers un changement qui se doit d’être radical et collectif. Chaque pas comptera. Qu’il soit petit ou grand. En tout cas, nous n’imposons rien, nous voulons simplement expliquer pourquoi ici, sur notre blog voyage, nos prochains voyages se feront sans avion.
Pour aller plus loin
Nous vous invitons vivement à lire ces articles, à suivre ces personnes et à regarder ces vidéos. Tous ici ont contribué à notre prise de conscience et nous ont aidé dans nos réflexions et décisions d’aujourd’hui. Merci de nous avoir ouvert les yeux sur cette urgence climatique et sur les pistes à suivre.
- Bénédicte, blogueuse sur Sea&Seed et à suivre sur Instagram et/ou sur Twitter (MelleBene)
- Documentaire « The Game Changers », disponible sur Netflix ou en VOD
- Conférence « CO2 ou PIB, il faut choisir » par Jean-Marc Jancovici
- Vidéo « Cette vidéo réchauffe le climat : merci de la regarder » par The Shift Project
- Article « Écogestes ou action collective : pourquoi il ne faut pas choisir » par César Dugast
- Infographie « Le classement des meilleures solutions pour le climat » sur Novethic.fr
- Vidéo « Effondrement, la résistance s’organise » par Partager c’est sympa
Un immense merci pour votre article si honnête et si clair. Je ne souhaite plus prendre l’avion mais mon conjoint n’en est pas à ce stade… j’espère lui faire comprendre mon point de vue grâce à vous, les chiffres, les graphiques, votre témoignage… encore merci !!
Merci Maïwenn pour votre commentaire. 😊 💚
Nous croisons les doigts alors pour que notre article ait un impact positif sur votre conjoint ! 🤞 🌍 🌱
Merci pour votre article si riche ! Ça me donne tellement envie de réduire encore mon empreinte carbone et d’arrêter totalement de prendre l’avion… J’aime beaucoup votre honnêteté et bravo pour l’approfondissement de vos recherches. C’est éclairant sans être culpabilisant, ça donne vraiment envie de faire mieux :)
Merci de ton retour Sarah ! <3
Nos voyages en avion sont responsables et nous générons sur ce poste-là quatre fois plus d’émission de CO2 (et équivalent) que la moyenne des français… ( 3.3 pour 2019 x 4 13.2 )
Ce n’est pas très clair car dans le graphe en dessous 2018 = 3 / 2018 = 1.8 / 2019 = 1.7
On e comprends pas trop pourquoi vous parlez de « 4 fois plus d’émissions de CO2 ?
Bonjour Michel,
Sur les 3 dernières années (2017 > 2019) nous sommes à en moyenne 2 tonnes de C02e par personne et par an.
En moyenne, les français « dépensent » 480 kg par an pour ce type de transport (source : http://ravijen.fr/?p=440)
Nous étions bien à 4 fois plus ! :O
Merci pour cet article inspirant. J’ai commencé l’année passée à faire mon bilan carbone et à l’intégrer dans mes bonnes résolutions au lieu de « Faire plus de sport » ou « Boire 2 litres d’eau par jour ».
Chaque petit pas compte, mais c’est vrai que décider de ne plus voyager en avion, c’est un grand pas … pas facile à franchir. Cette année, les grandes vacances, ce sera en train (comme expliqué dans le mail que je vous ai envoyé), mais malheureusement, je vais aussi à Lisbonne, la ville de mon coeur. On va déjà commencer un an sur deux, peut-être ?
Merci aussi pour ce graphique qui montre qu’à 4 dans une voiture, c’est moins polluant que le bus. Pas toujours facile de savoir quels sont les gestes qui comptent. Est-ce qu’il vaut mieux un bungalow dans un camping ou un hôtel ? Du poisson ou de la viande (si on n’est pas 100% végétatrien) ? De la viande d’ici ou des légumes de loin là-bas (en hiver, quand on n’a plus grand-chose par ici) ?
Bref, pas facile de faire les bons choix, donc merci de nous informer et de vulgariser tout ça. Je vous découvre et c’est une chouette rencontre !
Bonjour Séverine,
Merci pour votre commentaire :)
L’essentiel est tout d’abord d’avoir les ordres de grandeurs en tête pour privilégier les gestes qui ont le plus d’impact.
Pour cela, le comparateur de l’Ademe est très bien fait.
Après ce n’est pas toujours facile d’arrêter totalement l’avion. Réduire son usage est déjà une très bonne chose.
Surtout pour se rendre au Portugal… c’est un des pays d’Europe le moins bien desservi par le train…
Bien à vous.